Les hommes qui n’aimaient pas les femmes : Millénium 1 – Stieg Larsson

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19 novembre 2014 par sweetmadonna

Entamé il y a quelques années, je n’avais jamais pris le temps de terminer la lecture de ce premier roman de la trilogie Millénium de Stieg Larsson, Les hommes qui n’aimaient pas les femmes. La lecture récente d’un roman scandinave, 172 heures sur la Lune, m’a redonné envie de me plonger dans cette saga devenue célèbre à travers le monde et adaptée en films dans son pays, remaker par les américains (par David Fincher avec Daniel « Bond » Craig) et en bande dessinée.

 

 

Les premières pages du récit de Stieg Larsson nous emmènent sur plusieurs fronts. On suit tout d’abord un vieil homme, qui reçoit tous les ans une fleur encadrée pour son anniversaire. Puis nous suivons un journaliste, jugé coupable de diffamation contre un chef d’entreprise et enfin une « détective », spécialiste de la recherche de renseignement sur les personnes. Progressivement, toutes les pièces du puzzle vont se recouper et l’enquête au centre du récit va prendre de l’ampleur.

 

Essayons de commencer par le début. Millénium est un magazine proposant du journalisme d’investigation dans le domaine de l’économie. Géré par un trio, Erika Berger, Christer Malm et Mikaël Bromkvist, le magazine est dans la tourmente : un article rédigé par Mikaël mettant en cause un industriel de renom, Wennerstrom, leur vaut un procès pour lequel Mikaël est déclaré coupable de diffamation. Pour la survie du magazine, il décide de se mettre en retrait de la rédaction et est contacté par un avocat, Dirch Frode, travaillant pour un vieil industriel à la retraite, Henrik Vanger. L’objet de la requête d’Henrik Vanger est double : que Mikaël écrive une chronique sur la famille Vanger (et il y a beaucoup à dire) et qu’il enquête sur la disparition de la nièce d’Henrik, Harriet, dont il est sans nouvelles depuis plus de 40 ans. Persuadé qu’elle a été tuée, il a enquêté sans relâche durant toutes ces années sans parvenir à trouver la vérité. Et, tous les ans à son anniversaire, une photo encadrée envoyée par un inconnu vient lui rappeler cet événement funeste. D’abord réticent, Mikaël accepte finalement ce travail, qui devrait le tenir éloigné de Stockholm et de Millénium pendant une année. La récompense promise, outre une somme d’argent importante, est pour lui fortement alléchante : des preuves des agissements hors la loi de Wennerstrom.

 

Parallèlement aux affaires concernant Mikaël, nous suivons également celles concernant une jeune femme de 25 ans, des piercings et tatouages partout, un style vestimentaire très « punk », un caractère bien trempé, mais un talent énorme pour tout ce qui concerne la recherche d’information : Lisbeth Salander. Mise sous tutelle car elle refuse de parler aux médecins chargée de déterminer si elle est capable de s’assumer seule, Lisbeth travaille en free-lance pour Dragan Armanskij, patron de Milton Security, dont les enquêtes sur la personne sont une activité annexe. Elle sera amené à rencontre Dirch Frode et à enquêter sur Mikaël Blomkvist et Wennerstrom. Ses talents la mettront en première position lorsqu’il sera question de choisir quelqu’un pour aider Mikaël dans son enquête. Une rencontre qui bouleversera la vie de Lisbeth.

 

Outre ses deux personnages principaux, auxquels on s’attache rapidement malgré leur caractère bien différents, Les hommes qui n’aimaient pas les femmes propose une galerie de personnages secondaires riche et variée, réussissant à ne pas enfermer le récit dans son enquête centrale et offrant une conclusion recherchée, minutieuse et amenée de manière posée. Pas de fin abrupte donc, pas de questionnement sans réponse, pas de trou dans la raquette : ce premier volume de la trilogie peut se suffire à lui-même puisqu’il clôt les deux intrigues principales du récit.

 

Reparlons un peu plus en détails de notre duo de héros et commençons avec celui qui prend la place centrale du récit, le journaliste d’investigation économique Mikaël « super » Blomkvist, surnom lié à une oeuvre de littérature enfantine de Astrid Lindgren (plus connue en France pour son roman Fifi Brindacier) et qui lui a été attribué pour avoir réussit à démasquer un gang de braqueurs. Mikaël est un journaliste qui souhaite voir paraître la vérité et qui lutte contre la tendance complaisante de ses collègues pour certains grands groupes, et qui le fait savoir. Sa liberté de ton dans Millénium l’expose plus que d’autres mais il s’en accommode plutôt bien. Et forcément, lorsqu’il commet une faute, la sanction est lourde. Condamné à de la prison ferme pour diffamation, Mikaël va accepter l’offre de Henrik Vanger pour pouvoir couper un peu. Très proche de sa co-propriétaire Erika Berger avec laquelle il entretient une liaison erratique au long cours, Mikaël est un grand séducteur. Divorcé et père d’une adolescente, il mène une vie de célibataire endurci. Sa volonté de chercher la vérité lui sera fortement utile dans sa recherche sur Harriet Vanger.

 

Lisbeth Salander est un personnage beaucoup plus atypique. Si ses capacités de hackeuse solitaire reste dans une certaine « normalité » (voir caricature par certains aspects), son caractère, son passé et sa manière de vivre sont bien différents de ce à quoi nous sommes habitués. Très introvertie, Lisbeth ne laisse personne entrer dans sa vie. Ayant une mère souffrant d’Alzheimer, déplacée de foyers en familles d’accueil, mise sous tutelle, parfois violente, toujours silencieuse lorsqu’on lui pose des questions personnelles, Lisbeth n’est pas une jeune fille de 25 ans comme les autres et ceux qui la côtoie ont appris à faire avec. Deux choses vont bouleverser sa vie et son petit monde, bousculant ses certitudes : sa rencontre avec Mikaël et la mort de son tuteur, Palmgren. L’occasion, encore, de voir à quel point Lisbeth ne se comporte pas comme tout le monde, notamment lorsqu’il sera question de se venger d’actes atroces subit. Un personnage qui sort de l’ordinaire, auquel il est difficile de s’identifier mais qui réussit tout de même à provoquer un lien avec le lecteur.

 

En ce qui concerne l’enquête centrale du récit, celle portant sur la disparition de Harriet Vanger, elle commence très doucettement. S’il faut déjà du temps avant que le décor ne soit planté et que Mikaël puisse enfin débuter ses recherches, il en faudra encore plus pour voir une évolution réelle et, enfin, un premier indice capital, même s’il semble mince au premier abord. C’est à ce moment-là que l’intrigue débute vraiment, que la piste d’un tueur en série apparaît et que la recherche de la vérité fait un bon en avant. A partir de là, difficile de lâcher la lecture, les événements s’enchaînant rapidement et surprenant fortement. Après avoir multiplié les soupçons, Stieg Larsson parvient à faire un double retournement surprenant, inattendu, et une conclusion qui l’est encore plus. Décidément, cette famille Vanger est loin d’être normale… Et une fois l’affaire centrale pliée, c’est au tour de celle du tout début, l’affaire Wennestrom, de revenir sur le devant de la scène. Mais pas de la manière dont on le pensait. Stieg Larsson conclut donc son récit en bouclant la boucle, mais en laissant malgré tout une porte ouverte via le personnage de Lisbeth. Difficile de savoir comment l’auteur va remettre nos héros en contact pour le second volet de la trilogie mais il laisse en tout cas le choix au lecteur : pas de cliffhanger « forçant » le lecteur à se procurer la suite, mais un semblant de fin ouverte permettant d’envisager une suite, qui sera forcément différente dans son contenu, puisque les deux affaires dont il a été question dans ce premier volume sont closes.

 

Plutôt long à démarrer, la faute à une introduction très détaillée des personnages, du cadre et des histoires qui constitueront le fond du récit, Les hommes qui n’aiment pas les femmes se révèle passionnant sur la durée, avec une vraie montée en puissance du récit. Les découvertes de Mikaël et Lisbeth passionnent et le lecteur tente de recoller les pièces du puzzle en même temps que ses héros. Porté par un personnage principal très sympathique, secondé par une alliée originale, Millénium 1 réussit son pari d’intriguer, divertir et passionner son lecteur. Espérons que le deuxième volet soit aussi réussi, d’autant qu’il possédera l’avantage de ne pas avoir à présenter les protagonistes principaux. Un succès plutôt mérité en définitive.

 

 

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